Le Jeu Mystérieux de Ch'aska

Dans un vieux documentaire des années 60, l’ethnologue François Dumény nous fait découvrir un des rares jeux de société pratiqué en Amérique du sud.
Le petit téléviseur noir et blanc donne à voir un croquis d’un plateau de jeu réalisé sur un support d’argile plat, gravé, et peut être coloré.
Aux dires du commentateur, le plateau représente une étoile à huit branches, telle Ch’aska.
Bien que trouvé au sein d’une tribu d’amazonie, l’objet n’est vraisemblablement pas une création locale puisque le style de fabrication pré-inca de l’objet, comme celui rencontré dans la région de Nasca, sera confirmé par les experts.
De ce fait, on souligne une nouvelle preuve d’échanges commerciaux réalisés entre des populations séparées par de hauts sommets andins et de très grandes distances pour ces civilisations uniquement piétonnes.
Quant au Tracé réalisé sur l’objet d’argile, il représente en effet le symbole de Ch’aska - une divinité de la mythologie inca créatrice de l’Aube et du Crépuscule.
Soit une représentation de « l’étoile / planète Vénus », vue comme la plus brillante du ciel avec ses huit branches symbolisant les 8 ans nécessaires à son périple autour d’Inti, le Soleil.

Ch'aska devant INTI
Généralement, l’interprétation de hiérogliphes, de gravures ou de tracés, voire des géoglyphes, comme ceux de Nasca sont encore des énigmes non résolues.
Pour les géoglyphes de la région de Nasca, Il est certain que de nombreuses personnes ont affabulé ces tracés antiques.
Ainsi dans les années 60, l'évocation d'une représentation d'un homme en scaphandre tracé sur un flanc de colline se nourrit de récits de Science, voire d’Ufologie, très à la mode chez les touristes venus du nord.
La Vérité est que l’interprétation d'une « tête dans un casque d'astronaute du XXeme siècle » est toute semblable à un dessin stylisé par les amérindiens, ou aux sculptures et différentes poteries symbolisant bel et bien la tête d’un indien, d’une momie inca, ou d’une certaine Divinité au visage de Chouette !

Supposé Astronaute

une poterie symbolisant
une divine chouette.
Pour notre sujet principal, sur le plateau de jeu, figure donc la gravure d'une étoile.
Un cercle en divise la surface en deux.
Une part pour les pointes de l'étoile, et une autre pour son centre délimité par un collier à la base des branches.
Sur chacune des pointes de l’étoile et des bases triangulaires de ces mêmes pointes a été perçé un petit trou dans lequel les joueurs peuvent y planter un bâtonnet ou une plume comme le film/ documentaire nous le montre par la suite.
En 1987, le mathématicien Sydney Bagson dessina autrement le plateau de jeu de Ch'aska.
Il y est notable qu'une branche de l’étoile a été divisée en deux afin de positionner deux stations de départ avant la course.
Ainsi dans un Duel, sur ce plateau antique mais ludique, deux joueurs avancent en sens inverse d’un, deux, ou trois trous (cases) ; chacun leur tour sur le dessin de l’étoile Ch’aska.
Mais quel est donc le but du jeu ?
Le Duel enregistré sur la pellicule entre une jeune fille et un garçon - qui d' ordinaire ne partage pas les mêmes activités ou rites - répond que le but est d' être le voyageur qui reste dans l’étoile, soit dans la partie intérieur du cercle , symbolisant l’Aube soit la renaissance!
Comprenez que dans leur cheminement successif de une, deux ou trois casses, les joueurs finissent toujours leurs parcours face à face sans pouvoir poursuivre leur course.
A ce moment là :
Le joueur posté sur l’étoile est alors le gagnant.
Le joueur posté sur une pointe, sur un point de Crépuscule, est a contrario le perdant de la partie.
Quelques questions d’archéologie l
En 2008, l'assistant de l'archéologue Masato Sakaï relève que déplacer un pion sur un tracé est commun à de nombreux jeux dits de parcours.
Et si nous n’avions pas vu jouer deux enfants à Ch’aska, on s’interrogerait encore sur la fonction du plateau d’argile.
Reste que pour les géoglyphes de Nasca, existe l’hypothèse qu’ils aient été de grands parcours dédiés à quelques rituels, tout comme les labyrinthes des cathédrales catholiques.
De cette probabilité, l'archéologue Japonais imagine alors que cette tablette de Ch’aska soit la maquette d’un géoglyphe qui n’a encore jamais été mis à jour sur le sol andin.
Une autre vision de la tablette interroge:
En effet, bien que Vénus soit également présente dans la mythologie inca, la gravure du plateau semble artistiquement réalisée dans un style européen plutôt qu’inca ou amérindien .
Le syncrétisme religieux autorisé par les conquérants espagnols du 16 ème siècle en ces contrées aurait pu évidemment guider le trait du « Potier ».
On peut aussi penser que cet objet ludique ait été importé par un conquistador espagnol ou autre.
Reste que le même jeu n'existe pas en Espagne ou n’y a pas laissé de souvenir.

Image de l' expédition perdue : autre jeu !
Quant à fixer un âge à l’objet, la datation des matériaux utilisés pour ce travail de potier induit en erreur les recherches sur ce point
Attendu que les civilisations de ces terres étaient principalement orales, seule est constatable l’héritage d’une pratique ludique.
Question de mathématicien :
Sachant qu’il est possible d’avoir une stratégie gagnante à ce jeu de Ch'aska, peut-on estimer ce dernier de type combinatoire ?
Il est en effet très imprégné de calculs instinctifs ou volontaires, un peu à l’ image d'un Jeu de Nim .
Il est en ce point notable qu'une réponse apparaît dans le livre de Martin Gardner, préfacé par l’auteur de Science fiction, Isaac Asimov : « Casse-tête dans le Cosmos » paru aux éditions Dunod.
Dans ce dernier l’auteur nous invite à résoudre des énigmes pas à pas et par ricochets, nous permettant d’aller plus loin dans ce qui entoure 47 casse-têtes.
En fait, notre histoire de Ch’aska s'est inspirée de l'une d'entre elle tout comme parfois un bon Vin est mis dans une nouvelle bouteille.
Signé : Lucien Petit Puy.
Ci-après le Vin :